Préférant dormir dans la vallée plutôt qu'à L'Alpe d'Huez, et oui je suis frileux et une descente de 13 km à 6h du matin dans le froid m'aurait vraiment chagriné, ne sachant pas la météo prévue au moment de la réservation, j'avais réservé un Ibis à Grenoble, environ 50 mn en voiture du départ.
J'ai donc pu retirer vendredi mon dossard et faire une petite ballade dans cette station, l'Ile au soleil qui porte vraiment bien son surnom...
Petite nuit, mise en SAS à 6h40, je me retrouve, comme le monde est petit, à quelques mètres d'un Blogger Britannique dont je suis le blog depuis quelques temps.
1/ Les forces en présence:
Une fois la décision prise de participer, j'avais décidé une stratégie typée "promenade", surtout pour ne pas me retrouver perclus de crampes au pied du Galibier avec 70 km pour rentrer à pieds ou attendre une hypothétique voiture balais....Le petit tableau suivant montre mes calculs de temps de passage et la réalité réalisée, en fait très proche finalement:
Les puissances espérées restaient faibles, mais mon expérience d'enchaînement de cols de haute montagne étant nulle, je n'avais pas le choix, il me fallait assurer le coup, et surtout finir.
D'un point de vue alimentaire, j'avais donc prévu environ 9h de vélo pour garder une marge, ce qui me donnait 70*9 = 630g environ de sucre sous toutes ses formes à transporter. J'ai pour habitude de respecter ce qui fonctionne, j'utilise un mélange Fénioux Marathon pour les 2 premiers bidons de 800ml, soit 100g, 2 petites bouteilles à bouchon tétine remplies chacune de 300g d'un mélange Glucose/Fructose en proportion 2/1 (voir cet excellent article de A. Jeukendrup), et quelques pâtes de fruit pour assurer. J'avais prévu de remplir mes bidons à chaque fois que possible de façon à boire environ 800ml par heure.
2/ La course
Départ à l'heure, Je file rapidement vers Rochetaillée, rejoint par mon ami Salvatore qui se trouvait un peu derrière mais aussi dans cette première vague et qui me fait signe de le suivre pour rejoindre l'avant et nos coéquipiers du club, habitués aux 50 premières places de la Marmotte...Je le suis jusqu'au Barrage, mais je n'insiste pas car il me dit qu'il va monter le Glandon à 270w, ce qui ne correspond pas à mes projets.
Voila, les choses sérieuses commencent... Je profite un maximum des paysages somptueux dans ce premier col, pas si difficile finalement car plusieurs replats permettent de se reposer. En revanche, quel monde! difficile de se caler à une allure car il y a toujours un vélo à doubler ou un autre qui vous double...Je retrouve 2 Lyonnais du TAC, on parle une minute, c'est bien rare d'entendre notre langue sur cette Marmotte aux accents Polyglottes!...Le passage près du Barrage est vraiment de toute beauté, avec ce ciel bleu marine qui augure de fortes chaleurs pour plus tard...
Premier arrêt au sommet du Glandon que je rejoins en 1h55, conforme à mes prévisions, je remplis mes 2 bidons vides, et repars. Tout va bien, je me sens dans un bon jour et la montée ne m'a pas trop entamé, le fait de rouler à 230 w la plupart du temps est finalement très facile quand on est habitué à plus.
La descente est certes dangereuse car bordée de vide au début, puis très stylée "marteau piqueur" vers la fin en raison de l'état du bitume. J'en serai quitte pour un début de cervicalgie qui me reprendra d'ailleurs dans la descente du Galibier.
La vallée est sans soucis, je me cale dans un groupe d'une centaine d'unités, en file indienne nous atteignons le pied du Télégraphe. Très agréable aussi car très régulier, en plus les cyclistes présents autour de moi sont finalement très proches de mon niveau puisque la sélection s'est faite, et cela me permet de monter en respectant scrupuleusement mes intentions.
La troisième heure est passée, toujours pas de crampe, je commence à croire que je vais passer une bonne journée, je passe en haut du Télégraphe en 4h, ce qui statistiquement me place dans un temps total de 8h pour le tout. ça me va.
Puis le Galibier. En fait je crois que inconsciemment c'est ce col qui m'a attiré le plus pour venir faire cette Marmotte. Quelle beauté vers Plan Lachat, cette nature sauvage et puissante qui vous retourne les yeux et les tripes, ce mythe par lequel sont passés les Coppi, Mercx, Bobet et autres seigneurs du vélo...Que d'épisodes me reviennent à l'esprit quand je pose mes pneus dans les traces de mes héros de jeunesse...
Le dernier km est particulièrement dur, je rejoins d'ailleurs Salvatore à cet endroit, nous irons au bout tous les deux coute que coute, l'aventure est trop belle.
La descente est rapide, je passe un coupe vent que je supporte dans les tunnels (glagla, mes vieux yeux sont à la peine dans le noir, je stress un max car je sais que la roue qui me précède est à 50cm devant et que je ne la vois plus...) paysages encore magiques au Lautaret...
Puis la vallée. Je me sens très bien, je roule devant un petit groupe d'une dizaine de cyclistes, puis nous enchainons de beaux relais, je m'étonne du niveau de puissance que j'atteins lorsque je suis devant, surtout après 6h 30 de course, cela prouve que ma stratégie alimentaire a été bonne.
Arrêt au pied de l'Alpe pour remplir les bidons et affronter les 4 premiers lacets, monstrueux à ce moment, que j'avais déjà trouvé spectaculaires la veille lorsque je suis monté en voiture....
42°: c'est la température qu'affiche mon SRM, je m'arrose copieusement mais cela ne suffit pas. Au bout de 30mn je suis obligé de m'arrêter pour me rafraîchir dans une petite cascade au bord de la route qui est bienvenue! Mais le coup de chaud est irréversible et il me faudra 4 autres arrêts pour atteindre le sommet. Des températures un peu plus basses me permettent vers la fin de remonter un peu ma puissance, mais j'ai perdu pas mal de temps. Tant pis! Salv est parti devant et terminera une quinzaine de minutes devant moi..
L'arrivée est magique, je ne sais si c'est le stress et sa décharge d'adrénaline, ou la joie infinie qui m'envahit au moment ou je passe la ligne, mais quelques larmes viennent se mélanger à la sueur, cette Marmotte est une victoire, tous ceux qui passent ce dernier portique ont gagné, l'aventure humaine de ce truc est vraiment à la hauteur de ce que l'on m'avait dit....
3/ Quelques chiffres:
8h34, temps officiel, 1237eme/5295, 426eme/1936 cat E.
Comme le montre le tableau plus haut, mes chiffres de puissance sont conformes à ceux que j'avais prévu.
Bravo à Salvatore, qui entre dans les 1000 premiers en 8h19, et aux autres passionnés du Powertraining, Alban en 8h20, Benoit en 8h24...et le chef Bugno en 7h05, sur une autre planète!...
10 commentaires:
Superbe CR avec toujours les petits graph qui vont bien. Franchement 8h34 pour une premiere marmotte c'est vraiment pas mal!! Super que tes cramps soient restées de cotés. Reste plus qu'a remettre ça et comme moi ne pas explosé dans l'alpe. En tout cas tes puissances et tes temps sont assez cohérents par rapport à ceux de benoit qui doit emmener le meme poids que toi velo compris.
A bientot
Alban
Merci Alban, j'ai aussi beaucoup apprécié ton compte rendu sur velo101. Je crois que sur une telle distance et avec une telle chaleur, il était impossible de ne pas avoir un coup de moins bien à un moment ou à un autre!
Les puissances données par Benoit semblent tout de meme un peu hautes, surtout pour le Glandon, ou alors il est plus lourd que moi!
Félicitations pour avoir terminé cette épreuve vraiment difficile. La lecture de vos récits donne vraiment envie d'y participer. Peut-être l'année prochaine ?...
Salut Obelix, apres analyses plus fine il me semble pas que benoit soit pas si haut que ça.Pour le glandon j'ai 233 w NP(227moy) pour 1h24 contre 252 w NP pour lui. Les 5 kg d'ecarts aurait du donner 245 W soit 7 w trop haut. Mais en calcul théorique avec Awsoft je trouve 230moy pour 1300mD+(ne pas oublier les 2 petites descente),21.5 km et 76 kg tout compris.Donc moi je sous estimais un peu la puissance.Benoit est donc pas si mal. Inversement je trouve ta p moy basse. Pour 1h25 tu aurais du avoir plutot 245 W non?
Le débat est lancé!!
Bon.
Alors d'abord, j'utilise Bike Calculator, mais je pense que l'algorithme est semblable!
mes valeurs: poids 83kg avec velo, pour 222 w de puissance moyenne je tombe pile sur 1h27. pour toi en utlisant 1h25, je trouve 210w de puissance moyenne. pour Benoit, donc 81 kg d'apres ce que j'ai compris, je trouve 225w.
Voilu, après il faut voir l'abri des autres participants que nous avons pu obtenir, mais il n'y avait quasiment pas de vent et on peut assimiler les conditions identiques pour nous 3.
Il vaut mieux utiliser je pense la puissance poyenne plutot que la NP sur ce type de calcul.
Qu'en pense tu?
As tu renseigné 1300 m de D+ avec bike calculator? Car c'est bien la denivellé globale en prenant en compte les 2 descentes. Si je rentre 1195 mD+ avec awsoft je tombe bien à 212 w effectivement.
Si tu as pris 1300m alors c'est que les 2 logiciels doivent avoir par defaut des hypothèses de calcul differentes ou quelqueschoses comme ça!
Oui il faut utiliser impérativement la puissance moyenne pour comparer avec des calculateurs de puissance. La puissance normalisée n'a rien de physique (elle est même contestée par certains d'ailleurs), elle correspond à une puissance constante qui serait développée au même cout physiologique sur la durée en question.
Je te l'ai dit déjà directement Obelix, mais le répète encore, trouvant ta performance absolument remarquable car tu ne connaissais ni le parcours, ni la difficulté de tels cols.
Sinon, nous sommes loin d'être les seuls. Plusieurs coureurs dans les 100 premiers utilisent en course (la 1ère féminine par exemple) ou à l'entrainement (comme David) un capteur de puissance. Très rare en France, il y'en a quelques années, on en voit de plus en plus...
@Bugno: Merci encore, le grand interet de tout ça est de se dire qu'on a pu le faire, la mémoire de cet effort est désormais ancrée dans le cerveau, ça sera forcement utile un jour ou l'autre...
@Alban: je referai les calculs quand j'aurai plus de temps. De toute façon ce n'est pas très important, comme l'expliquait Bugno dans un de ses recents posts, on est à la limite de la marge d'erreur des capteurs, donc ça peut varier dans un sens comme dans l'autre!...
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